Attitudes et valeurs des jeunes étudiants à Alger et en Kabylie: leur perception des droits des femmes

Resumo

L’Algérie, malgré sa considération officielle de pays musulman, avec l’islam élevé au rang de « religion d’État », est traversée par des tendances politiques et religieuses divergentes. Au sein de ces diverses dynamiques, la présence des jeunes est de plus en plus remarquée.

En effet, en Algérie le poids de la tradition est profondément ancré dans les domaines de la pratique religieuse et de la vie privée ou familiale. Les droits des femmes sont un exemple paradigmatique de cette imbrication.

Dans ce texte, on s’intéressera concrètement à la régulation de l’héritage qui est inspirée directement de la loi islamique et qui, préconise un traitement inégal en fonction du sexe, justifié historiquement par les devoirs de l’homme envers les femmes. Ce faisant, dans certaines régions telles que la Kabylie, le droit islamique qui est aussi le droit algérien dans ce cas précis, est bafoué au nom de la tradition qui exclue les femmes de l’héritage, au nom du maintien du patrimoine dans la famille et de la paix sociale. Ces deux traditions sont soumises à des tensions qui s’expriment au nom de l’égalité des droits et qui illustrent les changements sociaux en cours dans le pays. De nombreuses femmes s’autonomisent des pressions familiales en optant pour la famille nucléaire ou en choisissant le célibat, en se déplaçant loin de leur lieu d’origine pour réaliser des études ou travailler, en mettant en avant une profession. Tous ces facteurs peuvent les amener à privilégier la logique de la rationalité économique individuelle ou de la famille nucléaire sur le respect de la coutume qu’elle soit islamique ou etnico-regionale. Dans cet article on s’intéressera aux positionnements des jeunes vis-à-vis de la religion et de la coutume qu’il s’agisse de réislamisation et retraditionnalisation ou de laïcisation à partir de l’exemple de leur perception des droits des femmes et de l’égalité des sexes.

Pour ce faire, on a mené une enquête par questionnaire auto-administré auprès d’un échantillon d’étudiants (282) des universités d’Alger et de Tizi Ouzou en 2017. La principale conclusion de notre e recherche réside dans le fait que les jeunes enquêtés malgré les changements sociaux qu’a vécue la société algérienne justifient les inégalités en avançant des arguments tirés des répertoires de la tradition qu’elle soit religieuse ou patriarco-familiale, réinventée récemment ou documentée historiquement.